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Live-Report
Breton - La Cigale

14 mars 2014
Rédigé par Amandine Hénon

Breton
La Cigale - Le 6 mars 2014

 

Petite parenthèse non musicale [ON] : L'emploi de la première personne dans une chronique n'a jamais été une pratique que j'affectionne ; pourtant, aujourd'hui, il me semble difficile d'en faire l'abstraction et de mettre l'affect de côté. Parenthèse [OFF]

 

Vous l'avez maintenant tous bien compris, à la rédaction de My Cat is Yellow, Breton font partie de nos coups de cœur. Il est en effet difficile de ne pas tomber sous le charme des mélodies tantôt dansantes, tantôt malsaines et dépressives du collectif londonien. Il y a quelques jours, nous avons eu la chance d'assister à la grand-messe ; remplissant désormais La Cigale, Breton étaient venus nous présenter le tout fraîchement sorti War Room Stories et l'occasion était donc idéale de venir tester le potentiel des productions léchées de ce second opus.

Si beaucoup voient en Breton la formation montante qui éclate avec un War Room Stories faisant autant vibrer les hanches que les neurones, j'y vois pour ma part le groupe encore mal dégrossi que j'avais rencontré un soir d'avril 2011. Un Roman Rappak souriant et un brin timide m'attendait alors dans les loges de la Gaîté Lyrique pour sa première interview en France et en français. De Bowie aux Talking Heads en passant par la littérature, on pouvait déjà, au travers de cette discussion, deviner l'émulsion artistique sous-jacente. Depuis, le papillon aux ailes bleues de leur War Room Stories a envahi la capitale, Breton a sa place dans les émissions musicales des télévisions nationales et tout le monde les voit comme la révélation musicale de ce début d'année 2014. Aujourd'hui, il était plus question de constater l'évolution d'un collectif foisonnant qui planche sur son examen de passage dans la cour des grands.
L'arrivée dans la fosse de La Cigale fut surprenante : la chaleur étouffante et la moiteur ambiante dans un premier temps ; la surprise de voir autant de monde pour la Breton Team ensuite. Sans plus attendre, les cinq touche-à-tout débarquent sur scène sous des applaudissements prononcés. Pas de mise en bouche ce soir puisque les Londoniens entrent d'emblée dans le vif du sujet avec Got Well Soon, single révélé il y a quelques mois et qui annonçait le virage introspectif et tumultueux pris par le collectif. Depuis le balcon, nous jouissons d'un panorama privilégié de la scène et du public. Tous semblent ravis, artistes comme spectateurs, et l'ambiance transpire la joie de vivre. Breton passent allègrement du dynamique et dansant Jostle à 302 Watchtowers. Couplés aux visuels de lapin, mouton ou hache dégoulinants, les titres de War Room Stories viennent conforter ce que nous avions déjà pu constater à l'écoute de l'album : la noirceur et le caractère anxiogène, sous couvert de servir quelques brûlots dansants.
Sur scène, le groupe d'aujourd'hui n'a plus rien à voir avec les timides et mal à l'aise jeunes mecs rencontrés il y a trois ans. Des danses de Dan au crowd surfing de Roman, tous sont désormais maîtres de la scène et tiennent le public en haleine pendant plus d'une heure trente.
Paris a toujours été une ville particulière pour Breton : la faute à ce nom à consonances francophones ? Le fait que les Français aient été les premiers à succomber à leur musique ? Peu importe, mais on pouvait s'attendre à un final digne de ce nom pour leur premier concert à la Cigale à guichets fermés. Les Anglais ne nous décevront pas en envoyant au public un plein carton de bâtonnets fluorescents. Petite surprise pour le groupe avec une multitude de ballons qui parsèment bientôt la scène et la salle. La Cigale prend des allures de club coloré ou de festival. Alors oui, on pourrait penser à un concert de Muse ou de Coldplay à l'évocation des ballons, mais ici, c'était plutôt un anniversaire géant entre potes et comme cadeau, la fantastique December, issue de l'un de leurs premiers EPs.

 

Maintenant que vous avez eu la version quasi objective de cette soirée, je me sens presque obligée d'y ajouter ce dernier « je », que vous ne retrouverez plus dans mes lignes après ce dérapage contrôlé. Je le confesse, j'aime Breton : j'aime la production quasi stakhanoviste de ce War Room Stories où chaque écoute révèle une nouvelle parcelle, j'aime la rugosité de certains de leurs sons mais par-dessus tout, j'aime voir un groupe qui prend autant plaisir à être sur scène et à donner. Quel grand moment que cette Cigale !