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Live-Report
The Horrors + Mueran Humanos à La Laiterie

16 novembre 2017
Rédigé par François Freundlich

Quel est ton Horrors préféré ? Celui de leurs débuts lors de leur concert aux Transmusicales de Rennes 2006, avec leur son inaudible et jouant dans l’ombre d’un stroboscope permanent ? Celui de l'album Primary Colors avec cette new wave spectrale ultra dansante ? Ou celui qui est apparu devant nous pour ce concert de La Laiterie où le quatuor anglais est devenu le groupe de rock indé idéal pour faire chauffer un club à blanc ? Dernière option retenue.
 

En première partie, le duo de synth-pop sur courant alternatif Mueran Humanos disperse ses longues mélopées angoissantes, préparant idéalement le terrain pour la suite. Les Argentins installés à Berlin cultivent une noirceur ténébreuse avec ce duo de claviers divaguant sur une basse maltraitée. Le chant en espagnol est tantôt déclamé ou susurré par la chanteuse Carmen Burguess, dont l’organe précieux n’est pas sans évoquer Liz Fraser des Cocteau Twins. Les structures complexes et décomplexées s’enchaînent pour nous brouiller le cerveau dans un set d’une intensité froide et vaporeuse. Parfaitement heureux d’avoir la chance d’ouvrir pour The Horrors, Mueran Humanos nous laissent dans un grand sourire avec la tête d’affiche du soir.

Les Anglais entrent en scène sous les hourras d’une fan base exaltée. The Horrors est un groupe qui n’a pas peur d’évoluer et nous en avons eu la preuve avec ce concert enchaînant les titres les plus accrocheurs de leur discographie mais faisant la part belle à leur cinquième et dernier album en date : V. Faris Badwan, le charismatique leader et son allure glam Bowiesque attire tous les regards sur lui en faisant résonner sa voix teintée de plus en plus de subtilité et de finesse depuis son side project Cat’s Eyes. Malheureusement, elle est également de moins en moins audible. Faris n’hésite pas à s’approcher au plus proche du public, l’effrayant parfois avec des mouvements brusques donnant l’impression qu’il va balancer son inséparable trépied de micro dans la fosse, allant même jusqu’à mimer un lancer de javelot. La voix est souvent masquée par des instrumentations mises en avant, comme la basse baladeuse de Rhys Webb, l’homme aux fougueux déhanchés chaloupés. Les nappes et blips synthétiques 80’s s’y emmêlent, apportant un certain psychédélisme aux développements post-punk et shoegaze des compositions. 

Si les morceaux du nouvel album sont généralement plus calmes par rapport aux habitudes du groupe, les adaptations prennent parfois des allures épiques en se voyant rallongées d’instrumentaux multi-facettes. L’un de ces nouveaux tubes se nomme Machine, dont les riffs surpuissants joués d’entrée de jeu ont le mérite de lancer idéalement le concert. Ajoutés aux excellents extraits de leurs anciens disques comme l’hypnotique et enivrante Sea Within The Sea et ses tourbillons synthétiques qu’on voudrait voir répétés à l’infini, nous obtenons des enchaînements de régalade sans temps mort. La douceur de Still Life, extrait de l’album Skying, achève parfaitement la première partie du set sur les assauts vocaux graves et profonds de Faris Badwan. Le rappel n’en sera que d’autant plus dantesque, terminant sur l’excellent dernier titre du dernier album : Something To Remember Me By. Ce morceau aux allures dancefloor signe certainement l’une des évolutions les plus marquées du groupe avec ce côté pop apparent et revendiqué, dans le sens noble du terme, pour un public qui ne demande qu’à chanter à tue-tête ce nouvel hymne du groupe. The Horrors termine sur un sommet devant un public aux anges qui y a livré ses dernières forces.

 

On avait bien l’impression d’avoir l’un des groupes majeurs du rock britannique actuel devant nos yeux, tant la cohésion entre ses membres et l’enchaînement parfait de morceaux puissants et variés nous ont transportés. Les souvenirs resteront bien après les aurores.